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Panorama

La montagne, cela va sans dire, offre de la hauteur. A certains endroits, elle domine les étendues tapies aux alentours et installe le regard de celui qui s'y trouve face à ce qu'on appelle un panorama. Le panorama ne laisse pas de plaire. Souvent pour qu'on en profite, certaines personnes soucieuses de ces regards de passage, installent à demeure une table d'orientation ou, comble de prévoyance, un banc.

Mais, il faut le dire : tous les vastes paysages ne sont pas des panoramas. Au sens strict, il implique que l'on soit posté sur un point surélevé, c'est là une condition nécessaire, c'est pourquoi la montagne, par ses hauteurs avantageuses, est si généreuse en la matière ( toutefois un gratte-ciel peut tout aussi bien faire l'affaire, bien qu'il soit peu commun dans la Forêt Noire ). L'autre condition, tout aussi nécessaire, est que le paysage qui se trouve alors à portée de vue soit le plus vaste possible, plus précisément, le panorama implique que le paysage soit panoramique, forcément. De là on comprend mieux pourquoi l'altitude lui est si favorable ...

Ces précisions faites, on voit bien qu'il y a des panoramas et des faux-semblants. Autant le savoir.

A présent que l'on peut s'accorder sur ce qu'est le panorama, demandons-nous pourquoi il est si plaisant.

Je me souviens de celui qui se découvre en haut de la Dune du Pyla (mer devant et forêt derrière et vice-versa et réciproquement), de celui au sommet du Crêt de la Neige ( avec le Lac Léman, le plateau de Geix et la chaine du Montblanc), de celui de la Tour Eiffel ou de celui des toits de la Basilique Saint-Pierre, et malgré leur diversité de paysages, tous ont en commun de plaire au point que quitter ces endroits nécessite de s'arracher de leur contemplation. Dans cet état presque hypnotique, nous nous trouvons bel et bien dans un état de fascination et c'est cela qui nous pousse à regarder encore et encore. Ainsi, la beauté d'un panorama ne plaît pas, elle fascine, et elle fascine parce qu'elle exerce un attrait irrésistible et quasiment paralysant que l'on ne peut quitter qu'à regret.

Qu'y a-t-il donc de fascinant dans la beauté d'un panorama ? Cela provient certainement du fait que la contemplation de ce type de paysage nous installe au milieu d'horizons si vastes que notre rapport à l'espace change de dimension. Pour nous en convaincre, souvenons-nous d'abord de ce que nous ressentons lorsqu'il nous faut le quitter des yeux et l'abandonner. On se souvient qu'à chaque fois que l'on se détache de ce genre de spectacle, on sent bien qu'il nous faut en payer le prix, rompre le charme en regardant ailleurs, généralement nos pieds, puisque le panorama est tout le reste autour de nous. En quelque sorte, pour s'arracher à ce type de contemplation il faut accepter de redescendre sur le plancher des vaches, accepter de quitter le point de vue des sommets et des hauteurs où l'immensité est dévoilée sous nos yeux et accepter de redevenir le voisin de palier de tous ceux qui peuplent nos horizons bouchés (fourmis, cloporte, etc. seule peut-être la girafe échappe-t-elle à cette catégorie). La beauté des panoramas nous fascine donc parce qu'elle nous permet d’accéder à un supplément de nous même qui n'existe que lorsque notre regard embrasse des horizons immenses, elle nous fascine parce qu'elle nous permet de saisir un au-delà de notre horizon si petit en nous montrant toutes les beautés que nous sommes capables de contempler d'un seul regard.

Finalement, en quittant ces paysages, on ne les abandonne pas, c'est une part de soi-même qu'on abandonne, celle qui accède à ces immensités. Et je crois qu'on le sent plus ou moins confusément lorsqu'on leurs tourne le dos, en soupirant.

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